lundi 25 juin 2012

Du jamais vu (The raid)

           Ce film indonésien avait fait sensation au festival de Toronto l’an dernier. Il y avait été décrit comme la nouvelle référence en matière de cinéma d’action. Après la projection, cette phrase semble complètement creuse tant « The raid » surclasse tout ce qu’on a pu voir dans le genre.


 Trente étages mais un seul degré
L’histoire est simple : une escouade de policiers doit démanteler un réseau de trafiquants de drogue retranchés dans un immeuble en décomposition de trente étages. Une simplicité qui, loin d’être un défaut, constitue l’atout maître du film. Pas une once de second degré ne traverse la mise en scène de Gareth Evans. Le pitch peut faire rire, mais tout ça est filmé avec un sérieux qui propulse déjà « The raid » parmi les meilleurs films du genre.
Il n’y a pas que cette simplicité qui tire le film de partout vers l’irréel : ses incessants combats chorégraphiés, ses personnages (presque) invincibles, la multiplicité de ses rebondissements auraient pu transformer « The raid » en une parodie burlesque de film d’action. Mais le réalisateur, par sa mise en scène, maintient obstinément le cap du réalisme, quelles que soient les extravagances qu’il a écrites dans son scénario ou demandées à ses acteurs-cascadeurs. Un exemple parmi d'autres : il ne triche pas avec les décors en refusant les plans impossibles. Le ton est grave, l'image d'un gris très pâle. On y croit, on est plongé dans l’histoire, le cauchemar de ses policiers est aussi le nôtre – condition nécessaire pour faire naître l’intense tension qui parcourt le film du début à la fin.
De même, les combats sont ici éloignés des chorégraphies aériennes tirant vers la danse ou la poésie comme dans « Hero » ou « Tigre et dragon ». Ici, les coups font mal, les couteaux éviscèrent, les membres se brisent et tous les éléments du décor sont exploités par les combattants. Le film est quand même interdit, avec raison, aux moins de 16 ans.

Inlassables scènes d’action
Les policiers, qui se retrouvent piégés dans l’immeuble, doivent pour survivre capturer le boss final, ou plutôt le chef de ce réseau criminel, qui pilote tout l’immeuble depuis son appartement au quinzième palier. L’histoire est en fait plus complexe que cela, mais obéit toujours à ce principe : il faut monter les étages, passer d’un niveau à l’autre comme dans un jeu-vidéo, car chaque niveau est plus dur que le précédent. Le générique final reflète très bien cette inspiration : la partie relative aux acteurs, très longue, est une liste numérotée des personnages, nommés par l’arme qu’ils utilisent ou par l’étage où ils se trouvent.
Comme on l’a dit, la simplicité de ce dispositif tirée du jeu-vidéo est bien plus réjouissante que problématique et permet surtout à Gareth Evans de réaliser une montée en tension impressionnante du début à la fin de son film. Lorsque les combats se déclenchent dans la deuxième partie du film, la plus longue, la succession de scènes d’action ne connaîtra pas de fin. Ni de baisse de régime : le rythme dingue et crescendo de « The raid » empêche le spectateur de décrocher. C’est ce qui rend ce film inouï : une suite incessante de bagarres, rythmées par la très bonne musique électronique de Shinoda et Trapanese [1], qui surprennent toujours, qui ne lassent jamais. Au bout de dix minutes, on se dit que c’est exceptionnel. Après une heure de ce régime, on ne peut plus qu’avouer qu’on n’avait encore jamais vu ça.
Le spectacle est incommensurable (impossible d’être déçu), le genre est poussé à son paroxysme, mais ce film ne vous plongera pas dans un abîme de réflexion à la fin de la projection. A cette altitude, ça n’a aucune importance. Mais c’est ce qui explique que je ne lui ai pas mis la note maximale. Dans une telle formule, peut-on apporter plus de profondeur ? Qu’il y réponde ou non dans ses prochains films, qu’il essaie ou non de faire encore plus grand, Gareth Evans est assurément un réalisateur à ne pas perdre de vue.
Des films de cet acabit, des ovnis pareils, sont très rares. Essayez de ne pas le rater.

On retiendra…
Une succession (quasiment) ininterrompue de scènes d’action aussi impressionnante que leur escalade, et d’un sérieux extraordinaire.

On oubliera…
Les quelques réflexions du film sont très basiques.

« The raid » de Gareth Evans, avec Iko Uwais, Yayan Ruhian,…


[1] Dans la version originale, la bande-son est composée par Prayogi et Yuskemal. Le distributeur américain du film a commandé à Shinoda et Trapanese une nouvelle bande-son pour le public occidental, alors que le film était encore en production. 

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