samedi 15 octobre 2011

Apologique ou magnifique ? (L'Apollonide)


-          L’un des cinq films français en compétition à Cannes propose de plonger pendant deux heures à l’intérieur d’une maison close, en deux temps : « au crépuscule du XIXème siècle » et « à l’aube du XXème siècle ». Le film se centre en particulier sur une prostituée connue sous le nom de « la Juive », qui rêve secrètement à une vie de couple avec son client favori – personnage par ailleurs plutôt inquiétant, comme nous le fait comprendre sans ambages la toute première scène du film.
-          Une fois celle-ci passée, force est de remarquer que le réalisateur et scénariste Bertrand Bonello nous offre une étude des mœurs et des habitudes de la vie des habitantes de la maison close, monde fermé et replié sur soi à l’intérieur duquel le temps est comme suspendu, plutôt qu’une véritable histoire. C’est d’ailleurs de là que vient la grande déception que ce film m’a inspiré, la première pour un film en compétition cette année à Cannes : il ne s’y passe presque rien.
-          Mais en quoi cela est-il gênant ? Car on ne s’y ennuie pas, loin de là ! Evidemment, en allant voir « L’Apollonide », qu’on ne s’attende pas à se retrouver devant le dernier blockbuster américain à la mode… et heureusement ! Ce n’est pas ce qu’on lui demande. Tout d’abord, l’action, bien que peu présente, est habilement distillée tout au long du film, alternant entre d’intelligentes phases de tension, et des scènes plus posées et contemplatives. La photographie est extrêmement réussie, l’ambiance feutrée et luxueuse de la maison close superbement retranscrite, de sorte que l’on s’y trouve immergé durant toute la durée du film. Chaque plan, chaque scène respire la perfection dans son traitement esthétique, mais aussi scénaristique : la déchéance des jeunes prostituées dans cet univers particulièrement raffiné, aux antipodes de leur propre quotidien, est ici montrée particulièrement crûment, entre bains de champagne et actes de torture perpétrés par certains clients, opulence et maladies vénériennes incurables : ces éléments en tous points opposés se percutent ici presque logiquement, entre émerveillement visuel et horreur ordinaire.
-          Les images sont peut-être très esthétiques, mais elles sont complètement froides. Bonello ne fait naître aucune empathie entre ses personnages et le spectateur, qui s’ennuie donc très vite puisque de l’autre côté il n’y a pas d’intrigue à suivre. Ne pas susciter l’émotion face à un tel mélange d’horreur et de luxe semble un comble ! Mis à part le jeu sur les oppositions qui se retrouve jusque dans la musique, anachronique, il n’y a pas grand-chose à retenir du film. Et après avoir montré tout au long du film la monstruosité des maisons closes, le réalisateur embrouille le spectateur avec une scène finale où il semble les regretter. Un dernier faux pas qui n’a pu qu’achever de me convaincre que « L’apollonide » est un beau film raté.

On retiendra…
La beauté des images : décors, costumes, éclairages sont très travaillés. L’interprétation des actrices. Les anachronismes.

On oubliera…
Aucune émotion, si ce n’est du dégoût. Surtout, une absence de réflexion et une fin qui sème le doute quant aux intentions du réalisateur.

« L’apollonide – souvenirs de la maison close » de Bertrand Bonello, avec Hafsia Herzi,…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire